Les altermondialistes la voulaient. Ils l’ont, servie par Nicolas Sarkozy en personne. Décidée pour la seule place de Paris, la taxe sur les transactions financières entrera en vigueur le 1eraoût prochain. Elle devrait rapporter 1 milliard d’euros de recettes et des points d’avance au Président qui devance le candidat socialiste en matière de lutte contre la finance honnie.
La finance dérégulée source de tous les maux
A partir du 1er août 2012, les transactions concernant des actions françaises, des CDS ou procédant du « trading à haute fréquence » seront assujetties à une taxe de… 0,1 %. Tout ça, pour ça. Avec un si faible pourcentage, la taxe française s’apparente plus au droit de timbre déjà pratiqué à la City de Londres de 0,5 % sur chacune des transactions, qu’à une véritable punition de la finance.
Il n’empêche que le principe est passé.
De plus, ce n’est pas si symbolique car 0,1% sur les transactions représente un surcoût non négligeable pour un investisseur, le montant dépassant le prix du courtage.
A vouloir montrer l’exemple à ses homologues européens, Nicolas Sarkozy en arrive à enclencher concrètement la lutte – de bon ton – contre la finance quand le candidat socialiste n’en est qu’aux déclarations.
L’argument décisif du Président est que la finance dérégulée doit participer au redressement des comptes puisqu’elle est responsable de la récession. On s’interrogera en quoi la finance est dérégulée, en quoi taxer c’est réguler et en quoi la finance est impliquée dans la désastreuse gestion des comptes publics, l’insolvabilité du débiteur n’étant jamais l’intérêt du créancier.
Une taxe à l’efficacité douteuse
Toutefois, la formule retenue par Bercy n’est pas celle du projet européen soutenu par la France et l’Allemagne, visant l’ensemble des transactions et dont l’ampleur aurait accéléré la délocalisation des activités bancaires.
Pour l’instant, ne seront taxés que les ordres d’achat ou de vente d’une action ou d’un titre d’un émetteur français, quel que soit le lieu de la transaction dans le monde. Encore que ce projet appelle des précisions puisque dans sa version actuelle lui échappent les opérations de changes sur les devises.
Cette mesure devrait produire 1 milliard d’euros de recettes fiscales dit-on à l’Elysée. Mais ce n’est pas ce qu’on dit aux Nations Unies. Selon le cabinet Unitaid, une taxe de 0,1 % sur toutes les transactions financières rapporte potentiellement jusqu’à 4 milliards d’euros. Tout dépendra de l’effet de cette taxe sur le volume des transactions.
Il est fort à parier que les fonds spéculatifs vont sans peine déserter la place pour préférer Londres, Zurich ou Genève. En revanche, les particuliers titulaires d’un portefeuille d’actions n’ont généralement pas les moyens de s’expatrier. La taxe sur les transactions financières constituera en réalité un nouvel impôt pour les investisseurs individuels. Les produits spéculatifs prétendument visés ne seront pas inquiétés.
Le financement des entreprises : dommage collatéral
A ce stade, le projet de l’Elysée ne s’attaque pas au marché obligataire puisque l’Etat émet lui-même des obligations pour financer son déficit. Logiquement, les transactions sur les obligations ne devraient pas rentrer dans le champ de l’impôt. Ce financement est d’ailleurs indispensable aux entreprises qui peinent à obtenir des crédits bancaires sous l’effet des nouvelles réglementations.
Toutefois, le fait que les actions et produits dérivés supportent la nouvelle taxe réduit la marge de financement des entreprises par des investisseurs particuliers.
Déjà, le capital des sociétés du CAC 40 est détenu à 42 % par des actionnaires étrangers. Leur contrôle va rapidement passer dans les mains des capitaux étrangers et il faut s’attendre à la délocalisation des sièges sociaux.
Mais dans l’immédiat, ce sont les banques qui accusent le coup par un nouvel effondrement de leurs titres en Bourse.